Depuis l’accession au pouvoir du parti PASTEF, la question de l’abrogation de la loi d’amnistie concernant les faits survenus lors des manifestations politiques de mars 2021 à fin 2023 divisent l’opinion publique et suscite des débats passionnés. Si certains plaident pour la levée de cette amnistie afin de restaurer une forme de justice pour les victimes, une telle soulève des obstacles juridiques majeurs et pourrait engendrer des conséquences politiques et sociales préoccupantes.
Le droit sénégalais, à l’instar des systèmes juridiques modernes, repose sur le principe de non-rétroactivité des lois. Dans le cas d’espèce, la loi d’amnistie en vigueur a eu pour effet d’effacer les sanctions pénales pour des faits qualifiés de délits ou de crimes lors des manifestations politiques. Si cette loi venait à être abrogée, cela ne pourrait avoir d’effet rétroactif que dans le cadre d’une exception extrêmement limitée. Or, une telle abrogation ne constituerait pas une loi pénale plus douce, mais plus sèvere, même avec le pretexte du maintien des sanctions déjà effacées pas la loi d’amnistie. Les lois pénales plus sévères ne retroagissent pas.
Aujourd’hui, la gestion de cette question doit s’inscrire dans une perspective de réconciliation nationale et de pacification sociale. Plutôt que d’abroger la loi d’amnistie, il serait préférable d’envisager des mécanismes de justice transitionnelle. L’abrogation de la loi d’amnistie pose des défis techniques insurmontables au regard du principe de non-rétroactivité et menace de raviver les tensions politiques et sociales. Pour le Sénégal, l’enjeu est de trouver un équilibre entre l’exigence de justice et la préservation de la paix. La voie de la réconciliation, dans le respect de l’État de droit, semble être la seule solution viable pour garantir la stabilité et la cohésion sociale.
Par Alioune Badara DIATTA