Le tribunal a-t-il coupé la poire en deux au regard du verdict donné hier par le juge dans l’affaire qui oppose le leader du parti Pastef Ousmane Sonko et le ministre du Tourisme Mame Mbaye Niang? Cette décision, peut-elle contribuer à un apaisement du climat politique électrique que nous vivons avec une peur au ventre? Pour bien entendu analyser ce qui s’est passé hier au tribunal de Dakar dans le cadre du procès en diffamation opposant Mame Mbaye Niang à Ousmane Sonko, des avis de journalistes et analystes politiques vous sont proposés pour mieux comprendre la situation.
Comment est vu le verdict rendu hier par le tribunal de Dakar dans le procès opposant Ousmane Sonko à Mame Mbaye Niang et qui fait état de 2 mois de prison avec sursis en sus de 200 millions cfa à titre de dommage et intérêt. Le maire de Ziguinchor, doit-il éprouver un sentiment de soulagement ou devrait-il plutôt s’en désoler?
De l’avis de Oumar Seck Ndiaye, analyste politique, Ousmane Sonko doit s’en peiner. Pour lui, au regard du procédé, il y’a des faits juridiques plus graves aujourd’hui qui restent impunis mais ce qui est rassurant c’est que le verdict ne rend pas Sonko inéligible.
« Si on voit le déroulement de la procédure, son avocat a été refoulé et tous les antécédents,
qui ont eu lieu et il est malade à ce jour à cause de ses interpellations. Je pense qu’il peut en être désolé. Mais aussi ce qui est rassurant, c’est que l’enjeu principal, était l’inéligibilité. Mais dans le cas d’espéce on parle de dommage et intérêt. Ce verdict ne rend pas Sonko inéligible mais quand-même il peut etre désolé d’autre part parce qu’il est évident que au niveau de la justice, il ya beaucoup d’interrogations sur les parties pris, les deux poids deux mesures. Les citoyens ne sont pas traités de façon égale vu le nombre d’arrestations de ses partisans ces derniers mois, vu les bracelets electoniques de ses proches et tout cela. Mais cela peut contribuer à un moment d’accalmie et d’apaisement provisoirement puis qu’il y’a d’autres enjeux », a dit le journaliste Oumar Seck Ndiaye alors que Assane Samb analyste politique lui, a une autre lecture de la situation. Pour lui, le tribunal a coupé la poire en deux en donnant une condamnation qui ne remette pas en question l’éligibilité du leader de Pastef tout en préservant les droits de la partie civile.
« Je pense qu’on peut dire sans risque de se tromper qu’il s’agit d’un verdict d’apaisement véritablement. Les droits de Mame Mbaye Niang ont été préservés. Sonko à été condamné sans que bien entendu cela remette en cause éligibilité. Donc quelque part aussi, on a préserver l’ordre et la stabilité publique. C’est le rôle fondamental de la justice, garant des libertés mais aussi de l’ordre et la stabilité publique. Les juges ont tenu compte effectivement su contexte toit en préservant les droits de la personne qui a porté plainte. Donc je pense que Sonko doit se sentir assez bien. C’est vrai que tout ce qui s’est passé est lié aux pressions très fortes sur la justice. On a vu des manifestations programmées en même temps que les procés, donc je pense qu’on ne peut pas dédouaner aussi Ousmane Sonko de sa responsabilité par rapport à ce contexte délétère. Maintenant on a vu un sens élevé de la responsabilité de la part des juges et donc des magistrats et de l’institution judiciaire de manière générale. Il faut s’en féliciter, en tirer les leçons et savoir que quel que soit le type de procès, la justice fera preuve de responsabilité et qu’il n’y a pas péril en la demeure et on ne peut pas attaquer, faire de mauvais procès à des magistrats », a-t-il indiqué Assane Samb.
En ce qui concerne l’indépendance de la justice, au vu du réquisitoire très lourd du procureur qui n’a pas été suivi du tout par le tribunal, Oumar Seck Ndiaye se démarque et soutient qu’il y’a une mainmise de l’exécutif sur le judiciaire.
« Je pense que si apprécie l’indépendance ou non de la justice il faut considérer dans un plus large. Regardons les vagues d’arrestations arbitraires et ça s’est qui? C’est la justice. Regardez comment certaines personnes sont dans l’impunité totale. Il y’a des gens qui insultent, d’autres qui appellent au meurtres, d’autres qui appellent à l’incendie, y’a des gens même qui sortent avec des machettes pour dire nous on va sur le terrain. Et ces gens là n’ont pas été interpellés. Si on regarde les arrestations c’est juste dans un camp et à cet égard peut-on parler de l’indépendance de la justice? Peut-être que ce verdict là qui vient de se passer il faut l’inscrire dans un contexte où il y avait deux procès, judiciaire et politique. Il y’a eu des morts, des blessés et beaucoup d’arrestations donc il y’a une tension. Mais moi je suis persuadé c’est mon intime convictiction, s’il ya des magistrats qui essaient d’être indépendants, la justice en tant qu’institution est entre les bras de l’exécutif. Et ça c’est des faits, c’est pas de la philosophie. C’est cela le sentiment que j’ai en tant que citoyen », a souligné Oumar Seck Ndiaye contrairement à Assane Samb qui se dit optimiste par rapport au fonctionnement de la justice, même s’il y a lieu de reconnaître qu’il y a des choses à revoir sur l’opportunité des poursuites.
« Je l’ai dit, on fait un mauvais procès à la justice quel que soit d’ailleurs le verdict, comme si les gens ne sont jamais satisfaits. Et quelque part il y’a un lien ombilical entre l’exécutif et le judiciaire par rapport à l’opportunité des poursuites mais ça s’arrête là. Bien que le dossier est entre les mains du juge. Mais qui peut donner des instructions à un juge. Je crois qu’il faut qu’on observe nous tous que dans ce pays là si nous on peut dire qu’on est journaliste indépendant, il faut quand-même reconnaître qu’il y’a des juges indépendants. Et que les gens puissent travailler dans une indépendance totale, dans un esprit de responsabilité.
Ce que l’on a vu est appréciable à mon avis au regard du contexte. Est ce que celui qui avait dit qu’il avait des documents de preuve contre Mame Mbaye Niang est-ce qu’il les a produits. Et ça c’est la question de fond. Pourquoi accuser un citoyen d’avoir volé des milliards si on n’a pas des preuves. Ça c’est une question. Mais combien de fois des journalistes sont condamnés en sursis dans des procès en diffamation mais chaque jour il y’a des centaines de procès en diffamation au niveau du tribunal donc ici on peut être optimiste par rapport au fonctionnement de la justice même s’il ya des choses à revoir par rapport à l’opportunité des poursuites », a conclu le journaliste Assane Samb.
Aly Saleh